Séminaire 7 octobre 2021

(R)Evolution’ air : la COMPLEXITE DE LA mesure de la qualité de l’air au cœur des enjeux democratiques et politiqueS 

7 octobre 2021 (9h-17h)

MSHSUD Montpellier – Université Paul-Valéry Montpellier 3

Site St Charles 2, 71 rue du Professeur Henri Serre Montpellier

Depuis le 10 juillet 2020[1], la France est contrainte de payer une amende de 10 millions d’euros par le Conseil d’Etat français en raison d’un manque d’actions efficaces pour réduire le dépassement de seuils réglementaires de pollutions atmosphériques sur son territoire. Cette astreinte record découle du jugement en date du 24 octobre 2019 de la Cour Européenne de justice[2] répondant aux besoins d’action et de prise en compte des enjeux sanitaires liés à la qualité de l’air que nous respirons. Ainsi sommé d’agir, l’Etat a pris un certain nombre de dispositions pour les collectivités territoriales, dans l’urgence[3], telle que la mise en place (obligatoire) des Zones à Faibles Emission mobilité (ZFEm). Ces dernières sont en cours d’élaboration et d’arbitrage et au cœur d’un certain nombre de programmes électoraux régionaux et de mandats métropolitains ou d’Agglomération, pour une mise en place progressive jusqu’en 2028. L’urgence à la mise en place de cette mesure vient se confronter à la réalité et la nécessité des usages des habitants des dits territoires qui vont voir leur quotidien potentiellement hautement impacté. En effet, dans les communes et intercommunalités concernées dans lesquelles ces zones seront instaurées seuls les véhicules les moins polluants (en fonction de leur certificat Crit’Air) auront le droit de circuler.

Dans un même calendrier, les AASQA, Associations Agrées pour la Surveillance de la Qualité de l’Air ont revu leur indice ATMO[4] au 1er janvier 2021 après 27 ans sans évolution. Parmi les nouveautés de ce nouvel indice, la prise en compte d’un nouveau polluant réglementé, les particules fines PM2,5[5] aux effets sanitaires avérés. Cette mesure permet d’harmoniser l’indice de qualité de l’air avec les seuils de l’Agence européenne pour l’environnement[6]. L’indice ATMO qualifie donc la qualité de l’air sur une échelle graduée en six points de « bon » à « très mauvais » pour informer les populations et appuyer le processus décisionnel des institutions publiques. Il ne prend pas en compte les mesures des particules les plus fines les PM1 et le PM 0.1 dont les études démontrent leur niveau supérieur d’impact en matière de santé publique[7].

Dans ce contexte, force est de constater que les habitants sont en demande d’information sur la qualité de l’air qu’ils respirent. Dans les faits, la volonté d’implication citoyenne se traduit par un nombre croissant de projets citoyens : capteurs citoyens, associations citoyennes procédant à leurs propres mesures. Qu’ils s’agissent des capteurs commercialisables sur les sites internet et peu coûteux, ou bien ceux dans la tendance « do it yourself » (à réaliser soi-même), les citoyens deviennent facilement et librement tous acteurs de la mesure de la qualité de l’air. Ces projets s’inscrivent dans un mouvement dit de renouveau démocratique à l’échelle des territoires et institutions publiques.

 

Notre séminaire propose d’aborder l’enjeu de la qualité de l’air sur deux plans interreliés. D’une part il abordera la complexité liée à la métrologie des particules fines et d’autre part ses traductions dans le processus politique et décisionnel, interrogeant de fait la place de l’expertise citoyenne.

Sur le plan métrologique nous vous proposons d’aborder l’état actuel des connaissances concernant la métrologie, la caractérisation et la modélisation des PM et de discuter de nos premiers résultats dans le cadre du projet ANR BREATHE mené sur le territoire d’Occitanie (2019-2023).

L’indicateur d’exposition moyenne (IEM) est une concentration massique exprimé en µg/m3, ce qui ne va pas sans poser de problèmes dès lors que la mesure consiste à compter à l’aide des capteurs les particules en fonction de leur diamètre. L’indice IEM est déterminé sur la base des mesures effectuées dans des lieux caractéristiques de la pollution de fond urbaine situés dans des zones spécifiques. Lorsque des sources spécifiques sont étudiées (ex : Traffic) la mesure de concentration de particules fines revient à effectuer une mesure relative par rapport à des stations de références, élément largement ignoré en général des citoyens et des pouvoirs publics. La mesure des particules fines s’effectue en général suivant deux techniques différentes (micro pesée, comptage) ce qui complexifie considérablement l’étalonnage de la mesure sur le plan règlementaire. La technique de comptage est déployée par les différents micros-capteurs et présente une tâche complexe allant jusqu’à questionner la définition des particules fines. Que mesure un micro-capteur quand il mesure par exemple des PM 2.5 ? Comment normaliser la mesure par rapport à la règlementation en vigueur ? Comment modéliser la concentration des particules fines et les phénomènes de dispersion associés ? Comment prendre en compte la complexité de l’ensemble des variables dans la modélisation ?

 

Sur le plan politique, la construction de l’action publique pour améliorer la qualité de l’air demeure tout autant complexe pour différentes raisons, la nécessité de sa prise en charge transversale en faisant partie. De plus, les pouvoirs publics n’ont d’autres choix que de s’appuyer sur la cartographie de la qualité de l’air provenant réalisée à l’aide des modèles dont les limites sont rarement discutées. De nombreux projets citoyens avec une dimension recherche plus ou moins approfondie ont vu le jour ces dernières années à l’échelle nationale.

Nous proposons de croiser les retours d’expériences pour la plupart en cours de ce type de projets autour de trois axes de recherche. Comment l’action publique se construit-elle dans les faits ? Quel est le niveau d’intégration des citoyens dans des démarches présentées comme participatives en lien avec l’enjeu qualité de l’air (mobilité, aménagement, métrologie et cartographie, déchets, biodiversité…) ? Comment et à quels niveaux la métrologie de la qualité de l’air s’intègre-t-elle dans la construction et le suivi de l’action publique ?

 

 Les propositions de poster sont à envoyer avant le 15 septembre 2021 à l’adresse suivante breathe.occitanie@gmail.com

L’inscription est libre et gratuite, chaque participant couvrant les frais liés au séminaire. Pour tout renseignement ou information complémentaire veuillez-vous adresser à Lionel Scotto d’Apollonia – 06 10 63 59 49 – lionel.scotto-d-apollonia@umontpellier.fr

[1] https://www.conseil-etat.fr/ressources/decisions-contentieuses/dernieres-decisions-importantes/conseil-d-etat-10-juillet-2020-pollution-de-l-air

[2] https://eur-lex.europa.eu/legal-content/GA/TXT/?uri=CELEX:62018CJ0636

[3] Pris en application de la loi d’orientation des mobilités (LOM) voir Décret no 2020-1138 du 16 septembre 2020 relatif au non-respect de manière régulière des normes de la qualité de l’air

https://www.legifrance.gouv.fr/download/pdf?id=x8h1GMsZOJg0LaYPl2_MCUvjG5MsDkfRtWfMxQ-Cnuk=

[4] Créé en 1994, l’indice ATMO est un indicateur journalier de la qualité de l’air calculé sur les agglomérations de plus de 100 000 habitants, à partir des concentrations dans l’air de polluants réglementaires.

[5] C’est-à-dire des particules fines (Particulate Matter) ayant un diamètre inférieur à 2,5 micro mètres

[6] European Air Quality Index — European Environment Agency (europa.eu)

Pour information les seuils européens sont supérieurs aux seuils préconisés par l’OMS :

https://www.who.int/fr/news-room/fact-sheets/detail/ambient-(outdoor)-air-quality-and-health

[7] MAHER (B.) et al. – Magnetite pollution nanoparticles in the human brain. PNAS, vol. 113, n° 39, p. 10797-10801 (2016).

FORTUL (T.) et al. – Health Effects of Metals in Particulate Matter. Intech, chap. 25, p. 571-608 (2015).

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